Nouveau rapport sur les maux invisibles des femmes au travail

Vendredi, 18 Août 2023

Durant le premier semestre 2023, la délégation aux droits des femmes du Sénat en France a mené des travaux sur la santé des femmes au travail (troubles musculo-squelettiques, cancers professionnels, charge mentale, violences sexistes et sexuelles, politiques de prévention...). Dans son rapport, elle fait le constat d’un déficit persistant d’approche genrée en matière de santé au travail, et formule 23 recommandations pour y remédier. 

Contexte du rapport

La délégation aux droits des femmes s’est intéressée à la santé des femmes au travail, thématique encore largement méconnue et peu étudiée sous l’angle des politiques de santé publique. Elle a mené six mois d’auditions sur le terrain afin de « mettre des mots sur ces maux et de rendre visible l’invisible qui fait mal »

Elle dresse un panorama des risques professionnels auxquels les femmes sont exposées, avec des focus sur quatre secteurs à prédominance féminine, car les recherches épidémiologiques manquent encore sur ces secteurs. Ce sont les métiers du care ; les professions du nettoyage ; le secteur de la grande distribution ; les métiers de représentation tels que les mannequins et hôtesses d’accueil. Le rapport interroge aussi le rôle assigné aux femmes dans l’emploi et l’impact de leurs conditions de travail sur leur santé. 

Les chiffres

  • 60% des personnes atteintes de troubles musculo-squelettiques (TMS),
  • +26% de risques de cancer du sein en cas de travail de nuit, 
  • 3 fois plus de signalement de souffrance psychiques chez les femmes,
  • 20% des femmes ont subi au moins un fait de violence (agression, harcèlement, violences sexistes et sexuelles) dans le cadre du travail au cours de l’année écoulée,
  • 7 agents cancérogènes sont présents au sein des produits d’entretiens couramment utilisés, 
  • la ménopause est présentée comme le dernier des tabous féminins alors que 14 millions de femmes qui travaillent sont concernées. 

Résultats du rapport

En matière de santé au travail, les données sexuées sont encore incomplètes et mal exploitées. Les maladies à caractère professionnel que vivent les femmes sont donc imparfaitement connues, à cause d’une sous-reconnaissance de ces maladies et des phénomènes de sous-déclaration (par exemple les TMS). De même, les difficultés associées à la santé sexuelle et reproductive (pathologies menstruelles incapacitantes, grossesse, infertilité, ménopause) font encore l’objet, au mieux d’une méconnaissance, au pire d’un déni voire d’une stigmatisation dans le monde du travail. 

Les postes de travail et les équipements, y compris de sécurité, sont faits pour « l’homme moyen », les politiques de prévention ou de risques sont construits autour des métiers masculins. Les femmes sont majoritairement exposées à des risques invisibles et silencieux liés à une usure physique et psychique, alors que les hommes sont davantage exposés à des dangers visibles, voire mortels.

Les recommandations

Les 23 recommandations du rapport s’articulent autour de 3 axes :

  1. Chausser systématiquement les lunettes du genre
  2. Développer et adapter la prévention à destination des femmes,
  3. Mieux prendre en compte la santé sexuelle et reproductive au travail, en particulier les pathologies menstruelles incapacitantes et les symptômes ménopausiques.

    En effet, il propose de développer l’exploitation des données genrées, car « Différencier n’est pas discriminer », de les intégrer dans les plans de santé au travail, d’obtenir un DUERP genré (document unique d’évaluation des risques professionnels), de développer et adapter la prévention, de revoir la liste des critères de pénibilité, etc.