L’inscription de la liberté d’avorter dans la constitution française

Jeudi, 7 Mars 2024

Le 4 mars 2024, la France est devenue le premier pays au monde à inscrire l’avortement – Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) – dans sa Constitution. Il s’agit d’un vote historique qui a une portée symbolique forte concernant les droits humains en France et dans le monde. Le Président de la République, Emmanuel Macron, parle d’une « Fierté française, message universel » sur le réseau social X. 

Les parlementaires réuni·e·s en Congrès ont voté pour l’inscription d’une phrase à l’article 34 de la constitution : « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ». 180 des voix des député·e·s, des sénateurs et des sénatrices étaient en faveur de cette inscription contre seulement 72 qui y étaient opposé·e·s. Il s’agit d’une victoire pour le féminisme : on pense naturellement à Simone Veil et Gisèle Halimi, mais aussi à toutes les associations et mouvements féministes qui ont permis d’en arriver là. En effet, « L’inscription de l’IVG dans la Constitution est la consécration institutionnelle d’une lutte qui ne s’est pas jouée que dans les institutions ». Cela représente donc un progrès pour les femmes et pour les personnes pouvant être enceintes, mais aussi plus largement pour les droits humains. 

S’il s’agit d’une avancée majeure, cette phrase dans la constitution ne garantit cependant pas l’accès réel à l’avortement. En France, avorter reste difficile du fait notamment des inégalités territoriales, de la dégradation du système de santé, de la fermeture de centres d’IVG, de la clause de conscience de médecins qui refusent de pratiquer des avortements, de la précarisation d’une large partie de la population etc. Sans oublier que, encore aujourd’hui, celles et ceux qui luttent pour le droit à l’IVG subissent toujours des attaques.  

Il est possible de soulever un progrès dans la protection des personnes pouvant tomber enceintes dans la majorité des pays européens. L’Irlande abroge une interdiction presque totale de l’avortement en 2018, par exemple. Cependant, beaucoup de pays ont toujours des lois qui entravent l’accès à l’avortement sûr et légal. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estime que les décès dus aux avortements non sécurisés représentent jusqu’à 13% de l’ensemble de la mortalité maternelle par an. L’avortement est toujours illégal en Andorre et presque entièrement illégal ou très limité en Pologne, à Malte et au Liechtenstein. Dans les pays européens où l’IVG est légale, cet accès n’est pas toujours évident.  

Les remises en cause du droit à l’IVG en 2022 aux Etats-Unis, puis dans des pays européens comme la Pologne et la Hongrie, ont fait prendre conscience de la fragilité de ce droit fondamental. L’inscription dans la Constitution française doit faire figure d’exemple pour le reste des pays européens, même si elle reste insatisfaisante pour assurer une liberté totale des femmes et personnes pouvant être enceintes de disposer de leurs corps.