L’Italie face à la justice : une décision qui ravive les tensions sur la question migratoire

Mercredi, 12 Mars 2025

De récentes affaires judiciaires ont renforcé l’image d’une Italie hostile à l’accueil des migrant·e·s en Europe. La dernière décision de la justice italienne a déclenché de vives réactions, notamment de la part de la Première ministre Giorgia Meloni et de la Ligue du Nord (parti d’extrême-droite, connu pour ses prises de positions xénophobes). 

Le blocage du Diciotti : une crise humanitaire et politique 

En août 2018, 150 migrant·e·s érythréen·ne·s secouru·e·s par le navire des garde-côtes italiens Diciotti se sont vu interdire de débarquer en Italie. Cette décision, principalement orchestrée par Matteo Salvini, alors ministre de l’Intérieur et président de la Ligue du Nord – un parti d’extrême droite aux positions ouvertement xénophobes –, a conduit à une impasse de dix jours. L’affaire a suscité une vague d’indignation, en Italie comme en Europe, ainsi que parmi plusieurs chefs d’État et de gouvernement. L’archevêque d’Agrigente s’était alors indigné : « Parfois, il m’arrive de penser que s’il s’était agi d’animaux, on les aurait mieux traités », dénonçant l’inhumanité des décisions prises. De son côté, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) avait exhorté le gouvernement italien à autoriser le débarquement immédiat des migrant·e·s et appelé à un effort de solidarité européenne pour leur relocalisation. 

 

Un verdict qui attise les tensions politiques 

Après plusieurs années d’examen, la justice italienne a tranché le jeudi 6 mars : le gouvernement devra indemniser les migrant·e·s du Diciotti. Cette décision a provoqué une réaction virulente du gouvernement actuel, dirigé par Giorgia Meloni, connue pour ses politiques anti-immigration. Sur son compte X, elle a dénoncé le jugement en des termes alarmistes : « Le gouvernement devra indemniser, avec l’argent des honnêtes citoyens italiens qui paient des impôts, des personnes ayant tenté d’entrer illégalement en Italie. » La Ligue du Nord a renchéri en déclarant : « C’est absurde. Que ces juges payent de leur poche s’ils aiment tant les clandestins. » Matteo Salvini lui-même avait déjà été impliqué dans une affaire similaire en 2019, lorsqu’il avait empêché le débarquement de migrant·e·s en mer alors qu’il était encore ministre de l’Intérieur. À l’époque, le tribunal des ministres avait ouvert une procédure contre lui, mais le Parlement avait refusé de lever son immunité, empêchant ainsi toute poursuite judiciaire. Depuis plusieurs années, l’Italie adopte une ligne dure sur la question migratoire, en contradiction avec les principes du droit d’asile européen. Celui-ci repose sur la Convention de Genève de 1951 et la Déclaration universelle des droits de l’Homme, qui garantissent à toute personne, y compris en situation irrégulière, le droit de demander l’asile. Le discours de Giorgia Meloni et de Matteo Salvini laisse pourtant entendre le contraire, contribuant à la stigmatisation des migrant·e·s et à une remise en cause de leurs droits fondamentaux. 

L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a désigné 2024 comme l’année la plus meurtrière pour les traversées maritimes de migrant·e·s, en particulier sur « la route de l’Est ». Ces chiffres alarmants rappellent l’urgence d’une solidarité européenne accrue et d’une politique migratoire plus humaine, afin d’accueillir dignement celles et ceux qui risquent leur vie pour un avenir meilleur.