Cyclone Chido : Mayotte face à la tempête, à la précarité et à l'indifférence

Jeudi, 19 Décembre 2024

Après le passage dévastateur du cyclone Chido, l'île de Mayotte se retrouve gravement touchée, ses infrastructures sont détruites et le bilan humain est encore inconnu. Dans ce contexte, les mesures prises par l'État français sont vivement critiquées, perçues comme des mesures discriminatoires, voire coloniales.

Un cyclone dévastateur

Avec des rafales atteignant 230 km/h, le cyclone a causé des dégâts importants. Les habitations précaires ont été les premières victimes de la tempête. Les infrastructures de communication ont également été lourdement affectées. 90 % des pylônes et des relais sont hors d'usage, rendant l'accès aux télécommunications et à internet quasiment impossible. Cette coupure des communications complique les efforts des autorités pour évaluer la situation et porter secours à la population, notamment dans les zones reculées. De plus, le réseau électrique ne fonctionne qu’à 50 %, et le système de distribution d'eau potable est hors service, exposant les habitant·es à des risques d’épidémie et à des problèmes sanitaires.

Un vestige du colonialisme

Mayotte est devenue une île française en 1841, puis intégrée à la République en 1848. Lors du référendum de 1974 sur l'indépendance des Comores, la population mahoraise a voté majoritairement pour rester française, marquant une rupture avec les autres îles de l'archipel qui ont opté pour l'indépendance. Depuis 2011, Mayotte est un département français avec les mêmes institutions qu'un département métropolitain (préfecture, conseil départemental).

Pourtant, Mayotte reste loin d'être traitée sur un pied d'égalité avec les départements métropolitains. Les infrastructures y sont sous-subventionnées, les services publics insuffisants et les conditions de vie sont marquées par une grande précarité. L'île est l'un des territoires les plus pauvres de France. Le PIB par habitant·e est bien en deçà de la moyenne nationale et l'administration est occupée par des cadres métropolitains. Ce déséquilibre reflète un héritage postcolonial où Mayotte, bien que juridiquement française, ne bénéficie pas pleinement des droits et des ressources de la République.

De plus, près de la moitié de la population est étrangère, vivant dans des conditions précaires, ce qui alimente des discours stigmatisants et des politiques migratoires restrictives. Ces mesures ne résolvent aucun problème et aggravent même les conditions de vie sur l’île.

Des réponses apportées inadaptées

La gestion de la crise à Mayotte après le passage du cyclone Chido a suscité une vive indignation. Alors que les Mahorais·es attendent un soutien urgent face à l'ampleur des dégâts, les déclarations de François Bayrou, qui a justifié son absence sur l’ile en invoquant le besoin de rester sur le "territoire national", ont été perçues comme un mépris envers l’archipel, qui est une partie intégrante de la France. Ce choix symbolique, couplé à une aide dérisoire de 655 000 euros — soit à peine 2 € par habitant·e —, a renforcé le sentiment d'abandon d'un département souvent relégué à la marge.

À cela s'ajoute une réponse sécuritaire inappropriée : l’envoi de 400 gendarmes supplémentaires, alors que l'urgence porte sur l'accès à l'eau potable, à la nourriture et au logement pour les habitant·es sinistré·es. De plus, les déclarations de Bruno Retailleau, reliant la reconstruction de Mayotte à la question migratoire, témoignent d’une approche où les tensions sociales sont instrumentalisées pour masquer le désengagement historique de l’État.