Abaad men center

Une ONG libanaise implique les hommes dans la lutte contre les violences sexistes

Mardi, 15 Mai 2018

L'ONG Abaad, une des principales organisations féministes du Liban, lutte contre les violences de genre. Depuis 2011, l'ONG a développé une expertise sur les masculinités, et tente d'impliquer les hommes dans la lutte contre les violences sexistes. 

Anthony Keedi, conseiller technique de la section masculinité dans l'ONG Abaad, affirme qu'il est nécessaire de travailler à la fois avec les hommes et les femmes dans la lutte contre les violences sexistes. Il raconte être souvent confronté à des femmes qui, lorsqu'on leur explique leur droits, disent être au courant mais préfèrerai qu'on s'adresse à "leur mari, leur frère, leur fils", car ce sont eux qui prennent les décisions pour elles. Les hommes étant acteurs du système de domination que subissent les femmes, il est nécessaire de travailler auprès d'eux.

L'idée de travailler avec les hommes vient donc du terrain, et des diverses réactions rencontrées lors des actions de l'ONG. Pour Anthony, travailler auprès des femmes est:

"Un traitement du cancer qu'est le patriarcat. Il est là, on fait ce qu’on peut pour limiter les dégâts. Le travail qu’on fait auprès des hommes, ce sont les recherches pour faire purement et simplement disparaître le cancer et qu’on n’ait plus besoin de le soigner. »

Abaad offre différents programmes: un men center qui propose du soutien psychologique, gratuit, anonyme et confidentiel. Lancé au départ pour les hommes ayant des comportements abusifs, le men center attire également des personnes LGBTIQ+.

Des workshops collectifs sont organisés, accueillant tous types d'individus, de tous âges, et de toutes origines. Pour faire venir les hommes à ces ateliers, l'ONG passe par des personnes travaillant sur le terrain qui peuvent les encourager à venir, ou en passant par d'autres ONG qui travaillent sur des sujets différents.

L'ONG préfère ne pas utiliser le mot "genre" de manière frontale, car, selon Anthony, un homme ne viendra jamais à ces ateliers si on l'accuse d'être violent avec sa femme. Ils appellent cette stratégie "Gender training without the G-word", former les hommes aux questions de genre sans jamais employer le terme.

Selon les dirigeants de l'ONG c'est une stratégie efficace car les hommes viennent parce qu'ils se sentent stressés, oppressés, et il est fréquent que les hommes ammènent le sujet des violences domestiques de leur plein gré. Le but est de leur permettre de se détacher des diktats de la masculinité, et de leur donner l'envie de soutenir l'égalité en leur faisant comprendre pourquoi elle est nécessaire et bénéfique pour tous.

Une initiative similaire existe au Rwanda: des hommes et des femmes ont été sélectionnés au hasard pour participer à un cours sur l'égalité femmes-hommes. La formation est financée par la ministère rwandais du genre et est dispensée par Rwamrec (Rwanda Men’s Resource Center), une ONG qui lutte contre les inégalités femmes-hommes et enseigne la "masculinité positive".